Mur. C’est Mur. Je suis devant, il est large et haut à perte de vue. Infini ? L’Infini n’existe pas n’est-ce pas ? Dites-moi qu’il n’existe pas ! Il ne peut pas exister, puisque pour savoir qu’il existe, il faut qu’il se produise, hors, si c’est l’Infini comment peut-il se produire ? Ma Tristesse est infinie, elle n’existe pas n’est-ce pas ? Dites-moi qu’elle n’existe pas ? Elle n’existe pas, mais elle est là. Ma Tristesse infinie est là, mais elle n’existe pas. Quel est donc ce sortilège ? Ce sort ?
– Non pas toi ! Reste la !
Donc… quel est ce sort ? ce fil que j’oublie ?… J’ai oublié ce que je voulais écrire… Ma Tristesse … Infinie… Mur … OK, je reprends…
– Elle n’existe pas ?
– Qui ça ?
– Comment ça qui ça ?
– Qui n’existe pas ?
– MOI !
Le seul paramètre que j’ignore de Mur, forcément, c’est son épaisseur. S’il est d’un Infini qui n’existe pas, je ne peux ni être plus haut que lui, ni plus large, je ne peux donc pas connaître son épaisseur. Si Mur, d’un infini en hauteur et en largeur qui n’existe pas, donc, effectue une rotation de 90° vers le bas, et que ce qui était son épaisseur, devient donc sa hauteur, et a pour dimension la longueur de Planck, je ne le vois plus, ne le ressens plus, ne peut plus le toucher, le voir, le sentir. Mais il est là. Il devient tout simplement si peu haut, qu’il peut passer dans l’espace qui sépare les atomes de mon corps. Il me traverse. Mur, devant lequel vous vous trouviez quelques minutes plus tôt, Mur, infranchissable même s’il est d’un infini qui n’existe pas, Mur infini en largeur et en hauteur, Mur devient maintenant d’un infini qui n’existe pas en profondeur. Les dimensions ne sont pas séparées et ne sont pas séparables. Toutes les dimensions qui existent, probablement d’un infini qui n’existe pas, sont liées, intriquées, et sont inséparables. Nous atteignons le Nirvana de la non-séparabilité, plus loin encore que la non-localité, il s’agit de non-séparabilité. Rien ne se sépare, jamais. Mur est Mur, il n’est pas plus Mur ici que là, en haut qu’en bas, en largeur qu’en profondeur, si après cette rotation sa hauteur devient la longueur de Planck, c’était auparavant son épaisseur, rien de bien sorcier, ni mathématiquement compliqué. Mais alors, pourquoi ne pourrais-je pas le traverser ? Sa largeur et sa hauteur étant d’un infini qui n’ existe pas ? Ici, nous pouvons comparer ça à un rêve lucide : vous êtes dans le rêve, vous le vivez : les sons, les odeurs, même le toucher. Tous vos sens vous indiquent que vous vivez absolument et sans aucun doute ce qui se passe, mais en même temps, vous savez que non, vous êtes tout à fait conscient que c’est un rêve. L’exemple le plus frappant est les chiens : vous voyez trois chiens énormes, baveux, prêt à faire de vous un méchoui cru de merguez d’humain, vous montez dans un arbre. Vous savez que vous êtes dans un rêve, que ces chiens n’existent pas, mais quand même, dans le doute, vu la taille de leurs crocs, vous restez dans l’arbre. Ici, c’est pareil : nous parlons d’un infini qui n’existe pas, mais s’il n’existe pas, alors cette largeur et cette hauteur, sont, sinon inexistantes, du moins finies. Non. Je vous le dis clairement : non. Vous pourrez passer votre vie, vous, vos enfants, petits enfants, arrière petits enfants, arrière arrière petits enfants, arrière arrière arrière petits enfants, arrière arrière arrière arrière petits enfants, arrière arrière arrière arrière arrière petits enfants…
– Bon c’est bon, tu va aller jusqu’où comme ça, c’est lourd ?
– Oh ! C’est bon c’est pour donner une idée de l’infini…
– C’est n’importe quoi, c’est nul !
Donc, reprenons… Vous pourrez passer toutes vos futures générations jusqu’à (…n…) petits enfants…
– Joli le rattrapage
– Merci
…Que jamais vous n’atteindrez l’infini. L’infini est toujours potentiel, quantifiable mais potentiel. Il n’existe, en quelque sorte, pas encore, et ne pourra jamais exister. Plus vous avancerez vers la droite ou la gauche, le haut ou le bas de Mur, plus ces directions s’éloigneront. Reste l’ épaisseur, qui je vous le rappelle, est devenu la hauteur suite à une rotation de 90° vers le bas et vers vous, donc cette hauteur est si faible, que vous ne la sentez pas. Je vous rappelle que si la hauteur est quantifiable comme la hauteur de Planck, les deux autres dimensions sont infinies. D’un Infini qui n’existe pas. Nous sommes liés à des dimensions où deux de nos dimensions connues sont d’un Infini qui n’existe pas. Et nous sommes même plus que liés, nous sommes dedans, nous sommes dans ces dimensions, et ces dimensions sont en nous, nous ne pouvons y échapper. À aucun moment, nous n’échappons aux règles de la physique : deux dimensions peuvent être infinies. L’Infini est toujours potentiel, donc n’existe pas. Ces deux dimensions sont donc d’un Infini qui n’existe pas. Mais il reste une de nos trois dimensions parfaitement classique, qui elle a pour mesure, selon l’angle où on la place, la longueur, la profondeur ou la hauteur de Planck. Une mesure parfaitement physique, dans toute sa splendeur, la dernière qui soit accessible à l’esprit humain, plus petite encore que l’espace qui sépare les atomes de votre corps, plus petite encore que l’espace appelé synapse, espace qui permet la transmission des informations entre les neurones, rien n’est plus petit, du moins dans ce qui nous est humainement accessible, technologie comprise, et ensuite… C’est Inconnue…